Le label « RUP Guyane » : une démarche qualité guyanaise à destination des convives de la restauration collective
D’ici 2030, les restaurants des collectivités de Guyane devront s’approvisionner à 50% en produits sous sigle de qualité, dont 20% en bio. C’est ce que prévoit l’un des décrets relatifs à la mise en œuvre de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire, dite « loi EGAlim ». Mais que nous indique cette mesure ? En favorisant un approvisionnement local, cette mesure place la restauration collective comme acteur essentiel dans la transition alimentaire des territoires et le développement agricole. Les interprofessions animales et végétales de Guyane, respectivement INTERVIG et IFIVEG , ont saisi cette opportunité en lançant le projet QUAL’YANA, avec pour objectif la création d’une démarche qualité locale permettant aux produits agricoles guyanais de s’inscrire dans les exigences de la loi EGAlim par la création d’un label spécifique aux Régions Ultra Périphériques : le label RUP GUYANE. La mise en œuvre de ces objectifs en Guyane constitue un levier pour augmenter notre part de souveraineté alimentaire, ambition reconnue prioritaire par le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.
Mots-clés : Restauration collective – Démarche qualité – Label RUP – Souveraineté Alimentaire
La Loi EGAlim et la restauration collective de Guyane
La loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire prévoit un ensemble de mesures concernant la restauration collective publique et privée. Une des mesures phares prévoit qu’à partir du 1er janvier 2030, 50% de la valeur monétaire de l’approvisionnement des restaurations collectives provienne de produits de qualité et durables, dont au moins 20% de produits issus de l’Agriculture Biologique (sous réserve des dispositions légales en vigueur pour la Guyane).
Or, la mise en application de cette loi dans les régions périphériques françaises révèle des particularités vis-à-vis de la métropole, qui sont :
- L’absence de sigle officiel de qualité en Guyane en dehors de l’Agriculture Biologique,
- Une augmentation potentielle des importations de denrées alimentaires labelisées extérieures au territoire.
Ces spécificités entrent en contradiction avec les objectifs initiaux du texte, que sont le soutien aux circuits de proximité, la reconnexion du consommateur avec la production locale et plus globalement le développement économique et social des territoires.
Le projet QUAL’YANA
C’est ainsi que les interprofessions guyanaises, en partenariat avec les services de la DEAAF-DGTM, ont mis en place le projet QUAL’YANA qui vise à établir une démarche qualité répondant aux critères de cette loi par la création du label « RUP Guyane » qui permettrait de justifier du mode de production et de l’origine géographique d’un produit. La restauration collective pourra ainsi s’approvisionner en produits locaux en accord avec les directives de la loi EGAlim.
Le projet QUAL’YANA a pour objectif la mise en place d’une démarche qualité permettant l’obtention du label « RUP Guyane » pour les produits agricoles locaux (animaux et végétaux) destinés au marché de la restauration collective de Guyane. Le label RUP, label européen spécifique aux Régions Ultra Périphériques européennes (RUP) permet d’établir une démarche qualité adaptée au territoire. En effet, la qualité des produits est encadrée par un cahier des charges rédigé localement et prenant en compte les spécificités positives de la Guyane.
Le projet QUAL’YANA a commencé en juin 2020 par la mise en place d’une synergie entre les acteurs des filières concernées et les services de la DEAAF-DGTM pour procéder à l’écriture des cahiers des charges des produits animaux. Ils ont été élaborés pour le porc, le poulet de chair, les œufs, le bœuf et le buffle. Les pratiques d’élevage sont décrites de la naissance jusqu’à l’abattage et permettent de garantir une qualité régulière de la matière première produite. Cette matière première labellisée est ensuite découpée et transformée selon un second cahier des charges décrivant les pratiques agro-alimentaires avec une obligation d’approvisionnement en matière première label « RUP Guyane ». Les pratiques de découpe et de transformation de la viande en Guyane ont été inscrites dans des cahiers des charges permettant à ce jour de labelliser la viande de porc, de volailles, bovine, bubaline et les saucisses de porc.
La méthodologie du projet
La mise en œuvre de la démarche qualité s’appuie sur un travail de terrain et de concertation avec les acteurs. Il s’agit d’intégrer les dynamiques actuelles de l’ensemble des acteurs du territoire pour générer une co-construction du projet. L’ambition est de produire des cahiers des charges au plus près des pratiques existantes pour garantir leur appropriation collective et de faciliter l’utilisation et la gestion du label par les usagers. Les éleveurs et les opérateurs des structures d’abattage et agro-alimentaire de Guyane ont respectivement participé à l’écriture des cahiers des charges « production » et « découpe et transformation ». Les opérateurs de la restauration collective ont explicité leurs besoins et leurs modalités d’approvisionnement. Les services de la DGTM-DEAAF ont été consultés à de nombreuses reprises afin d’intégrer les services étatiques dans la démarche menée sur le territoire. Enfin, un comité de pilotage a permis de réunir autour de la même table tous ces acteurs afin de valider collectivement le contenu des cahiers des charges.
La suite du projet
Après validation officielle de neuf cahiers des charges le 09 février 2021 par le Conseil d’Orientation pour la Stratégie et le Développement Agricole (COSDA) regroupant les différentes familles professionnelles concernées et les pouvoirs publics, la dynamique est lancée à l’échelle du territoire. L’utilisation du label par les opérateurs locaux doit cependant passer par un travail d’animation et d’accompagnement des acteurs afin de pérenniser l’appropriation du label, tant au niveau de l’offre que de la demande. Ce travail doit passer par la sensibilisation aux intérêts des produits locaux et aux exigences de la loi EGAlim.
Pourquoi soutenir l’approvisionnement local en restauration collective ?
L’approvisionnement des restaurations collectives guyanaises en produits locaux permet de répondre à un enjeu de santé publique et d’éducation nutritionnelle en participant à l’éducation alimentaire des convives qui ont alors l’occasion d’acquérir de bonnes habitudes alimentaires. La restauration collective joue un rôle primordial dans le soutien et dans la structuration des filières locales en encourageant des projets collectifs qui mobilisent différents maillons d’une filière. En effet, à travers cette démarche de labellisation, ce sont les dynamiques territoriales collectives déjà existantes qui sont renforcées. Cela peut représenter une opportunité pour le territoire puisque les opérateurs sont encouragés à fournir un effort en termes de recherche et d’innovation pour accélérer la montée en gamme des productions locales. Ainsi, la restauration collective, en offrant un marché complémentaire aux productions locales, œuvre à la croissance de l’activité agricole et agroalimentaire du territoire. L’alliance de ces différents objectifs s’insère pleinement dans l’ambition annoncée de souveraineté alimentaire portée par le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, mis en avant lors de la crise sanitaire, en rapprochant les consommateurs des producteurs.